"Elle risque d'avoir un cancer parce qu'elle a le gène du cancer." Combien de fois ai-je entendu cette phrase?  Et pourtant, c'est faux. Nous portons tous en nous des gènes susceptibles d'être cancérigènes, mais pas forcément sous une forme qui risque de provoquer un cancer.

En effet, comme je l'expliquais précédemment, un gène est une unité d'information génétique avec une fonction donnée. Il existe de nombreux gènes qui peuvent être impliqués dans les cancers, ce qui est d'ailleurs une des raisons de la complexité de cette maladie. Cependant, la fonction première de ces gènes n'est évidemment pas de provoquer un cancer.

Je prendrais ici pour exemple les cancers du sein, qui concernent une femme sur neuf, mais peuvent aussi toucher certains hommes. Les gènes principaux impliqués dans les cancers du sein sont BRCA1 et BRCA2 (pour "BReast CAncer", cancer du sein en anglais). Dans leur fonction normale, ces deux gènes codent pour des protéines impliquées dans les mécanismes de réparation de l'ADN. Ces mécanismes complexes permettent de réparer fidèlement une molécule d'ADN lorsqu'elle est abimée, ce qui arrive fréquemment dans la vie d'un organisme. Or, des modifications anormales de l'ADN sont un des facteurs du cancer. Ainsi, BRCA1 et BRCA2 sont des gènes dits "suppresseurs de tumeurs", car leur fonction normale protège de l'apparition des cancers. Il est donc bon d'être porteur des ces soi-disant "gènes du cancer".
Mais alors, pourquoi sont-ils accusés d'être responsables des cancers? Parfois, les mécanismes de réparation de l'ADN commettent des erreurs, qui peuvent résulter en des changements de la séquence d'ADN, appelés mutations. Si les gènes sont les définitions de l'encyclopédie du vivant, les mutations, elles, en sont les fautes d'orthographe. Une mutation peut ainsi changer le sens d'un gène, ce qui résulte en une modification de sa fonction.

"Mon boulot, c'est d'empêcher le cancer" -- MUTATION! -- "Oh, peu importe"
par Beatrice the Biologist

Si une mutation a lieu au niveau d'un de ces gènes BRCA1 ou BRCA2, elle peut modifier leur fonction. La réparation de l'ADN est alors moins efficace, ce qui favorise l'apparition des cancers. Ces cancers touchent particulièrement les seins et les ovaires, mais peuvent aussi concerner d'autres organes.
Il est toutefois important de noter que mutation n'est pas synonyme de maladie. En effet, comme une faute d'orthographe, une mutation peut aussi n'avoir aucune conséquence, voire avoir des conséquences positives, en améliorant la fonction de la protéine codée par le gène.
Dans le cas des cancers du sein, seuls 5 à 10 % sont dus à des formes héréditaires de mutations, c'est-à-dire que la personne possède une mutation dans BRCA1 ou BRCA2 qu'elle a héritée d'un parent. Cette mutation est présente dans tout son organisme, pas seulement dans les organes qui peuvent être touchés par un cancer. Ce sont ces mutations qui augmentent le risque chez la personne, et ce sont elles qui sont recherchées lors des tests génétiques. Comme toutes les mutations ne sont pas délétères, il existe des variations normales entre individus dans la séquence d'ADN d'un gène. Les tests génétiques recherchent donc des mutations déjà identifiées comme étant cancérigènes. C'est là que la recherche entre en jeu, car toutes les mutations potentiellement à risque ne sont pas encore connues, et certains gènes sont moins bien étudiés que d'autres.
Donc, pour résumer:
   - Il existe un grand nombre de gènes potentiellement impliqués dans les cancers, et ils sont présents chez tout le monde.
   - Ce sont des mutations, c'est-à-dire des modifications dans la séquence du gène, spécifiques qui sont à l'origine de la prédisposition aux cancers.
Bref, tout le monde a "des gènes du cancer", mais ce n'est pas pour autant une source de prédisposition au cancer.


sources: Pour en savoir plus sur le cancer du sein, RDV sur le site dédié de l'Institut Curie

TAMERE, STRING et PANTHERE, une insulte populaire? Non, c'est plutôt le nom de trois techniques génétiques développées par des chercheurs suisses.

Vous imaginiez les chercheurs comme des personnes trop sérieuses, enfermées dans leur laboratoire et sans humour? Voici pourtant la preuve qu'ils ont parfois un humour décapant, notamment dans les noms qu'ils donnent à leurs découvertes. Et ils sont nombreux à le faire.

"L'imagination est plus importante que le savoir" Albert Eistein

Aujourd'hui, je vous propose ainsi une petite sélection personnelle de noms de gènes surprenants. La preuve que les chercheurs ont une imagination débordante (à moins que ça ne soit l'effet de la caféine combinée au manque de sommeil chez un étudiant en thèse débordé...)

Les plus forts pour trouver des noms de gènes originaux, ce sont ceux qui travaillent avec la drosophile, la mouche à fruit, très utilisée dans les études génétiques.

Le premier de ces gènes aux noms surprenants que j'ai découvert devrait parler d'abord aux germanophones. Il s'agit de toll, un mot allemand qui signifie "incroyable", exclamation qui aurait été utilisée lors de sa découverte et qui est donc restée. Un gène tellement incroyable qu'il a valu un prix Nobel à sa découvreuse, Christiane Nüsslein-Volhard.

Chez cette mouche, on trouve aussi un gène nommé "ménage à trois", parce que la protéine qu'il code ne peut agir qu'avec deux autres partenaires. Curieusement, le symbole de ce gène est "metro"...

Moi qui suis fan de la Mongolie, j'aime aussi beaucoup le gène nommé "genghis khan"!

L'étude des drosophiles semblent être un univers riche en chercheurs accros à la fantasy et la science-fiction. On trouve en effet chez cette mouche le gène smaug qui bloque l'action du gène nanos (mot qui signifie "nain" en grec). Et que dire de ces gènes qui font partie de la matrice (extracellulaire): neo, trynity et morpheyus?

Mais il n'y a pas que chez les drosophiles que l'on trouve de drôles de gènes. superman est ainsi un gène ... d'une plante, nommée Arabidopsis thaliana. Il contrôle la formation des organes mâles, d'où le "super-mâle". Par contre, l'action de superman est peut être bloquée, par kryptonite évidement!

Mais que se passe t-il dans les laboratoires?

Les Mammifères ne sont pas en reste, puisqu'ils possèdent un gène nommé sonic hedgehog, qui signifie littéralement Sonic le hérisson. Certains chercheurs seraient-ils aussi un peu geeks?

Il semblerait, puisque certains d'entre eux ont découvert l'anneau! Ou plutôt RING, un "Really Interesting New Gene", c'est-à-dire un "nouveau gène vraiment intéressant".

Pour conclure, il semble que certains chercheurs usent et abusent du café lorsqu'ils cherchent un nom pour leurs découvertes, et d'ailleurs ils l'assument! En effet, savez-vous comment les plantes contrôlent leur horloge interne? Comme les humains, grâce au café bien sûr! Ou plutôt, grâce à un gène appelé time for coffee.


Alors, êtes-vous désormais convaincus que les chercheurs ont de l'humour?


Il existe encore tant d'autres gènes aux noms insolites qu'il m'est impossible de tous les lister ici. Si vous voulez en découvrir d'autres, en voici quelques-uns:
   - en mode science-fiction
   - chez la drosophile
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